Coup de coeur aux Îles Cook

Véritable joyau du Pacifique Sud, les Îles Cook restent encore méconnues du tourisme de masse, ce qui ne fait qu’ajouter à leur charme authentique. En 2017, j’ai eu la chance d’y passer six mois dans ce pays qui allait changer ma vie.

Le commencement

Alors que la fin de mon baccalauréat approchait, j’ai commencé à faire de l’anxiété à l’idée de suivre la route toute tracée. M’imaginer mener une vie de style 9à5 à Montréal m’angoissait au point de me donner des crises de panique. Je vivais à Dublin à ce moment-là et bien que j’avais hâte de partir, je n’avais pas envie de rentrer dans le confort de la vie à la maison, au Québec. Sur un coup de tête, j’ai donc cherché des emplois à l’étranger.

Après plusieurs semaines de recherches, je n’avais toujours pas eu de coup de coeur pour quelque chose en particulier. C’est alors que je me suis rappelée d’un stage que j’avais trouvé pendant ma première année d’université alors que j’avais Googlé « stage marketing pacifique » (je suis finalement partie à Bali cet été-là). J’ai donc retrouvé l’offre d’emploi et j’ai eu un feeling.

Je n’avais jamais entendu parlé des Îles Cook auparavant et je n’avais pas vraiment approfondi mes recherches sur ce pays davantage au moment où j’avais trouvé l’offre la première fois. Mais cette fois-ci, plus j’en apprenais, plus cet endroit et cette expérience m’attirait. L’offre était pour un stage en marketing pour un groupe hôtelier, le Pacific Resort Hotel Group, basé sur l’île capitale de Rarotonga. J’ai écrit pour voir s’ils étaient toujours à la recherche d’une stagiaire, l’offre datant bien sûr de quelques années. La réponse vint rapidement, et après seulement une entrevue, je me suis retrouvée dans le processus d’application de visa de travail. Je commencerais mon premier emploi « adulte » sur une petite île. Ça semblait irréel.

Je suis donc rentrée chez moi pour quelques mois, le temps de troquer mon manteau de pluie pour des bikinis, puis suis repartie à l’aventure sans trop d’attentes. Jamais je n’aurais imaginé, en partant à l’aéroport cette journée-là, que ma vie était sur le point de changer.

Arrivée à Rarotonga

Je suis descendue de l’avion par le petit escalier, arrivant au tout petit aéroport. La première chose qui m’a frappée fut l’humidité et la chaleur de l’endroit pour l’heure matinale. Le soleil venait tout juste de se lever sur l’île et quand je me suis retournée, la vue qui s’offrait à moi m’a simplement coupé le souffle.

Je fus accueillie par Esther, qui serait ma supérieure pendant mon stage. Avec un traditionnel lei autour du cou, je suis montée dans son camion et elle m’amena à ce qui allait être ma demeure pour les 6 prochains mois, une maison que je partagerais avec une Californienne du nom de Marissa. Dès les premiers instants, j’ai su que Marissa et moi allions devenir de grandes amies. Notre maison était modeste, mais plus que parfaite. Nous étions à 1 minute à pied du bureau et à 2 minutes de la plage. Notre petite cours donnait sur des palmiers et bananiers et j’ai vite su que je me plairais ici.

La vie à Rarotonga

La plus grande adaptation que j’ai dû faire pendant mon séjour sur l’île fut de ralentir. Au début, ce fut un petit choc. Tout était si lent et quand tu arrives de la vie dans la culture nord américaine, le contraste est frappant et cette lenteur était presque fâchante parfois.

J’ai dû apprendre à donner des rendez-vous à l’heure island time, ce qui veut en fait dire que ce n’est pas une heure juste, et qu’il y aura probablement un peu de retard, parce qu’ici, rien ne presse.

J’ai appris à aller au marché public à tous les samedis pour chercher mes aliments frais et prendre le temps de discuter avec les gens et de découvrir l’artisanat local. J’ai appris à admirer les couleurs du ciel tous les soirs et que chaque coucher de soleil était vraiment unique. J’ai appris à déconnecter de la technologie, le wifi étant extrêmement rare et très coûteux sur l’île.

Au coeur de tous ces apprentissage se trouvaient aussi des gens, des personnes sans qui je n’aurais peut-être pas ouvert mes yeux à toutes les merveilles que l’île avait à m’offrir. Je repense à cette dame qui m’a offert un lift alors que j’attendais l’autobus avec mes sacs d’épicerie et qui m’a rendu ce service par pure gentillesse, sans rien attendre en retour, et avec une telle ouverture à en apprendre sur moi, ma langue et ma culture le temps d’un trajet de voiture. Les gens qui ont croisé mon chemin pendant cette période de ma vie m’ont tendu les bras grands ouverts pour me permettre d’en apprendre plus sur leur mode de vie et leur culture, et ce d’une façon tellement simple et chaleureuse que ça m’a émue et complètement désarmée.

À Rarotonga, les gens ne me demandaient pas ce que je faisais dans la vie ni où j’avais étudié. Ce que je faisais ne définissait plus qui j’étais. J’avais l’impression de ne plus être limitée par ces étiquettes que je m’étais attribuées avec les années, mais je me suis aussi sentie complètement dénudée sans elles. J’ai dû réapprendre à me définir à travers qui je suis, les valeurs que je prône et les gestes que je pose, plutôt que par les standards de la société. À Rarotonga, tout était dans le moment présent. On ne pensait plus au passé, ni trop au futur. On profitait de la vie, tout simplement.

Rapidement, les tours de l’île à vélo ou sur mon scooter sont devenus des petits plaisirs de la vie quotidiens. Regarder les matchs de rugby des équipes locales religieusement tous les samedis aussi. Se délecter d’un ika mata frais pendant le weekend, ce n’était même plus une question. Je m’étais imprégnée de la vie sur l’île.

Un stage aux Îles Cook

C’était un emploi de rêve. Nous étions 3 stagiaires, incluant moi, ma coloc Marissa et une fille de Nouvelle-Zélande nommée Jenna. J’ai aussi croisé le chemin de Marine, une Française, pendant quelques semaines avant qu’elle quitte et nous sommes devenues amies rapidement dans cette courte période de temps. Nous étions toutes sous la supervision d’Esther et nous avions beaucoup de plaisir à travailler ensemble au bureau. J’ai vite découvert ce en quoi consiste un emploi en marketing d’hôtellerie et j’ai su que j’avais trouvé ma place (lucky me!). Les journées passaient rapidement et j’apprenais beaucoup.

Nous avions également des avantages intéressants, comme coordonner des séances photos et émissions de télévision, ainsi que la possibilité de séjourner dans les resorts de la compagnie. Et c’est exactement ce que nous avons fait…

Séjour à Aitutaki

Nous ne pouvions pas être aux Îles Cook et ne pas visiter l’île paradisiaque d’Aitutaki. Parce que si Rarotonga était déjà une île ravissante, rien n’égalait la beauté d’Aitutaki. Marissa et moi avons donc décidé de se faire plaisir et sommes montées à bord du petit avion domestique vers ce petit joyaux. À notre arrivée à Aitutaki, nous avons été escortées directement au resort, Pacific Resort Aitutaki, un resort 5 étoile de la chaîne pour laquelle nous travaillions, où nous avons été accueillies comme de vraies princesses. Dès l’arrivée, un accueil chaleureux avec une nu fraîche (jeune noix de coco) et un service remarquable. Notre chambre était spacieuse et très luxueuse. Jamais je n’aurais eu les moyens de me permettre une telle expérience si ce n’avait été du rabais employé.

L’endroit était un havre de paix. Pendant la journée, kayak sur les eaux les plus bleues que j’ai vues et snorkeling avec des poissons colorés. Et le soir, la meilleure nourriture que j’avais goûtée à ce jour. On ne voulait plus que ça se termine. Mais malheureusement, le weekend tirait à sa fin et il était temps de retourner au travail.

Un changement en moi

Avec cette expérience, c’était la 4e fois que je vivais à l’étranger. Cependant, cette fois-ci, quelque chose était différent. Cet environnement, ce mode de vie, cette culture, tout de cet endroit m’appelait à rester. Je changeais et plus le temps avançait, plus j’en étais consciente. Plus je voyais le temps défiler, plus je redoutais le moment où j’allais devoir quitter cet endroit. Je manquais de temps pour tout vivre et tout apprendre de ce que ce paradis avait à m’offrir. Ici, je me sentais réellement libre pour la première fois. Et avec l’idée de perdre cette liberté nouvellement trouvée, revint mon anxiété.

Un mois avant mon départ, on m’offrit de prolonger mon stage pour deux mois supplémentaires. J’avais alors une décision à prendre. Ce fût un travail mental épuisant et impossible. Pour la première fois, j’avais envie de m’établir quelque part. J’étais heureuse ici. Je n’aurais jamais pensé que vivre sur une île à boire des noix de coco et mener une vie en toute simplicité serait un jour une option que je considèrerais. J’étais à la fois sous le choc d’en être là et complètement émerveillée. Mon coeur me criait de rester, mais au fond de moi, je savais que j’avais tout pris ce que je pouvais de cette expérience et que ma place n’était pas ici pour toujours. Et prolonger mon séjour ne rendrait que plus difficile le départ qui s’annonçait déjà triste.

Jamais dans ma vie je n’avais vécu une douleur aussi profonde que le moment où j’ai dû monter à bord de l’avion. Ce jour-là, je quittais non seulement une personne que j’aimais (rien pour m’aider!), mais aussi une vie que j’avais tranquillement construite au cours des mois. Je quittais une demeure qui m’avait rendue heureuse, des souvenirs riches en émotions, des amis formidables, un mode de vie et un endroit qui avaient changé ma vie. C’est un deuil que j’allais devoir faire et qui s’avérerait plus difficile que jamais.

Voici un aperçu de la vie à Rarotonga

2 ans plus tard

J’ai quitté Rarotonga il y a maintenant près de deux ans et demi. Je réussi aujourd’hui à écrire cet article sans verser de larmes, mais le chemin pour arriver jusqu’ici n’a pas été tout rose et a demandé un travail sur moi-même pendant plusieurs mois.

Aujourd’hui, je suis reconnaissante pour cette partie de ma vie qui m’a tant appris. Je suis finalement en paix avec ma décision et enfin compris le rôle qu’avait à jouer ce chapitre pour la suite de ma vie. Il n’est pas toujours évident de comprendre pourquoi les choses se passent d’une certaine façon et le doute survient souvent, surtout quand les choix que l’on fait sont douloureux. Avec du recul, cependant, je suis fière d’avoir écouté mon feeling, autant pour m’être lancée dans cette folle aventure, que pour avoir pris la dure décision de quitter cet endroit paradisiaque.

Ma chère île de Rarotonga, un jour, je serai de retour pour une visite. Jusqu’à là, je te dis meitaki maata pour tout.

Publications similaires