Anxiété : La pandémie m’a appris à suivre mon instinct

En 2016, alors que j’étais sur le point d’obtenir mon diplôme universitaire et étais confrontée aux multiples possibilités que la vie m’offrait pour l’avenir, j’ai commencé à faire de l’anxiété. La situation était accablante et pour la première fois, je quittais l’environnement confortable et rassurant qu’était l’école et étais confrontée au fait que les décisions allaient être plus difficiles à prendre à partir de maintenant, car de nombreuses options s’offraient à moi et le choix n’était pas évident.

À partir de ce moment, les crises d’angoisse sont apparues à chaque fois qu’une décision importante se présentait. J’ai un esprit très analytique et je me rendrais folle à essayer d’analyser (ou plutôt sur-analyser…) chaque option, en essayant de décider laquelle me conduirait au plus haut niveau de bonheur. Je n’ai jamais vraiment compris d’où me venait cette anxiété. Je me suis simplement dit que ça devait être parce que j’avais peur d’avoir des regrets en prenant une mauvaise décision.

Puis, arriva la Covid-19…

Lorsque la pandémie a atteint notre continent, toutes les sphères de ma vie se sont pratiquement effondrées. J’ai perdu mon travail, les choses se sont terminées avec le gars que je datais, je ne pouvais plus voir mes amies et j’ai dû retourner vivre chez mes parents. Au début, j’ai pris tout ça comme des vacances forcées et j’ai pris du temps pour moi pour mieux accepter ma nouvelle réalité. J’ai réussi, pour un moment, mais au fur et à mesure que le temps passait et que je n’étais pas encore rappelée au travail, je savais que j’avais une décision à prendre concernant ma carrière… et avec celle-ci revint mon anxiété.

J’ai trouvé ma passion dans l’hôtellerie et le tourisme, qui est malheureusement l’une des industries les plus durement touchées pendant la pandémie. Personne ne savait quand les gens voyageraient à nouveau et quand nous retrouverions nos emplois. J’ai donc dû décider si je voulais garder mon poste et me mettre dans une situation financière précaire ou démissionner et poursuivre ma carrière ailleurs pour m’assurer un revenu plus stable et une progression de carrière.

Je suis quelqu’un qui demande toujours conseil à tout mon entourage quand j’ai une décision à prendre. Pour moi, c’est une façon de m’assurer que je n’oublie aucun détail qui pourrait m’aider à prendre ma décision. Mes amis et ma famille ont souvent des arguments différents de ceux auxquels je pense et je trouve toujours cela intéressant. Avec leur opinion et leurs arguments en tête, je me sens mieux équipée pour analyser chaque option et prendre la décision la plus éclairée.

Donc, cette fois, comme d’habitude, j’ai demandé à mon entourage ce que je devrais faire, n’ayant aucune idée quoi faire. La moitié d’entre eux m’ont dit que je ne devrais pas perdre de temps à ne rien faire à la maison et que je devrais aller chercher une expérience supplémentaire dans une autre industrie jusqu’à ce que les choses reviennent à la normale. L’autre moitié m’a dit de ne pas démissionner de mon travail actuel, car il m’avait fallu beaucoup de temps pour y arriver et je venais tout juste de l’obtenir avant que la pandémie n’arrive. Ils m’ont dit que je devrais juste être patiente, profiter de tout ce temps libre et simplement être prête à retourner au travail lorsque je serais rappelée, les chances que mon poste soit définitivement coupé étant très faibles.

Je me sentais complètement perdue. Je ne savais pas qui écouter et je ne savais pas ce que je devais faire ni même ce que je voulais faire. Dans ma tête, les deux options faisaient autant de sens et je ne pouvais tout simplement pas me décider. Je passais des nuits blanches à essayer de savoir quoi faire et ma tête me rendait folle. Puis, lorsque le montant des subventions que je recevais pour vivre entre-temps a diminué, j’ai pris cela comme un signe pour commencer à chercher un autre emploi et je me suis rapidement retrouvée dans le processus d’embauche pour une autre entreprise. Toutefois, je n’ai pas obtenu le poste et c’est là que tout est devenu clair, car j’ai réalisé que j’étais en fait extrêmement soulagée.

Sans vouloir me vanter, des multiples entrevues d’embauche que j’ai faites jusqu’à présent, ça ne m’est arrivé qu’une seule autre fois de ne pas obtenir le poste, alors le fait que cela se reproduise a allumé quelque chose dans ma tête. La première fois, c’était en 2017, alors que je venais de rentrer de 6 mois aux Îles Cook et que je n’étais pas heureuse d’être de retour au Québec. J’étais perdue et je ne savais pas quelle prochaine étape prendre, alors j’avais passé une entrevue pour un emploi à Montréal que je n’avais pas obtenu. C’était alors devenu clair qu’en fait, je ne voulais pas rester à Montréal et que je voulais retourner à l’étranger. J’avais été soulagée là aussi.

Lorsque j’ai reconnu le même sentiment de soulagement quand je n’ai pas obtenu le poste cette fois-ci, j’ai réalisé qu’en fait, je ne le voulais pas vraiment. J’ai réalisé que je m’étais forcée à passer par ce processus parce que ma tête l’avait rationalisé comme la meilleure option, mais je ne le feelais pas vraiment. Ce que je voulais réellement, c’était garder mon travail actuel, même si ça venait avec un niveau d’incertitude pour le moment. Je crois vraiment que les entreprises peuvent ressentir si quelqu’un veut vraiment un poste et quand ce n’est pas le cas. Juste pour être claire, je ne dis pas que CHAQUE fois que je n’obtiendrai pas un poste ce sera parce que je ne le voulais pas vraiment, je ne suis pas si prétentieuse! Ça adonne seulement que jusqu’à présent, les deux fois où ça m’est arrivé avaient quelque chose en commun.

Des décisions de coeur, pas de tête

J’ai réalisé que depuis le début, j’avais su au fond de moi ce que je voulais faire, mais que mon instinct avait été distrait par mon esprit analytique. J’ai réalisé que les décisions de vie devraient être rationalisées jusqu’à un certain point, oui, mais qu’elles devraient aussi surtout venir du cœur, pas de la tête (ce que je fais souvent très inconsciemment). Ça devrait se résumer à « Est-ce que ça me fait sentir bien? » J’ai réalisé que ce besoin de sur-analyser tout dans ma tête plutôt que de suivre mon instinct n’est en fait que de l’insécurité. Je ne me fais pas confiance. J’ai réalisé que peut-être que si j’arrêtais de voir chaque prise de décision comme un problème à résoudre (tête) et que je suivais simplement ce qui me fait du bien (cœur), peut-être que je ferais non seulement des choix qui me rendraient plus heureuse, mais aussi que ça soulagerait sûrement beaucoup mon anxiété. Bon, plus facile à dire qu’à faire, mais juste réaliser ça, c’est énorme pour moi, car ce n’est pas si évident pour un esprit anxieux comme le mien une fois que je suis prise dans ma tête.

J’ai commencé à repenser à tous les moments de ma vie où j’ai pris une décision spontanée sans trop réfléchir et j’ai réalisé que ces décisions étaient parmi les meilleures que j’aie jamais prises de ma vie. Partir vivre aux Îles Cook a été une décision très impulsive, pas du tout rationalisée, et s’est avérée être une expérience qui a changé ma vie. Aller en Grèce cet été avec quelqu’un que j’avais vu seulement deux fois auparavant dans ma vie, alors que tout le monde pensait que j’étais folle de le faire, s’est également avéré une décision très positive. J’ai réalisé que mes meilleures expériences de vie, celles qui m’ont vraiment fait sentir vivante, étaient toutes dues à des décisions prises un peu sur un coup de tête, parce que j’avais un feeling, sans avoir été trop analysées.

Bien sûr, cependant, ce ne sont pas toutes les décisions que j’ai prises ainsi qui se sont avérées positives. Partir en solo à 19 ans pour vivre à Bali pendant quelques mois n’aura pas été ma meilleure décision. Cependant, je viens de réaliser que je ne l’ai jamais regretté. Et ça, c’est la deuxième leçon que j’ai apprise. La raison même pour laquelle je sur-analyse les choses en premier lieu est que j’ai peur d’avoir des regrets. Par contre, en y repensant, même les expériences qui se sont révélées moins positives n’ont jamais fini par être des regrets au final pour moi. Alors, pourquoi est-ce que j’ai si peur de prendre une mauvaise décision alors que je sais que même les expériences les plus négatives ont simplement fini par être des leçons d’apprentissage pour lesquelles j’ai fini par être reconnaissante?

Cette pandémie m’aura poussé à explorer mon processus de prise de décision et m’aura donné le temps et l’espace pour approfondir ma confiance en moi et en mon instinct. Bien sûr, je suis réaliste, mon anxiété ne disparaîtra pas comme par magie avec ce que je viens de réaliser. Par contre, je crois que j’ai maintenant une meilleure compréhension de sa source et de comment travailler là-dessus dans le futur. La pandémie aura eu de nombreux effets négatifs, mais je suis reconnaissante pour ce bon côté qu’elle m’aura amenée.