Jusqu’à maintenant
Depuis le début de la pandémie en mars 2020, j’ai toujours accueilli les différentes étapes de celle-ci avec ouverture et résilience. Le printemps 2020 était comme des vacances forcées et tout était encore nouveau et excitant. Ensuite est venu l’été et certaines mesures sanitaires ont été levées, ce qui a permis d’avoir un peu plus de plaisir, divertissement et même quelques voyages.
Quand les cas se sont mis à augmenter à nouveau à l’automne, j’ai pris le temps de faire de l’introspection et de réfléchir à où j’en suis dans ma vie et où je me dirige pour la suite. J’ai accueilli la nouvelle année avec sérénité, en espérant pouvoir continuer de simplement surfer la vague de surprises à venir dans la nouvelle année.
Le nouvel an commença avec plusieurs changements. Je ne voyais plus mes amies en personne, puisque je voulais faire ma part pour aider à faire baisser les nouveaux cas et par soucis de sécurité pour les gens que j’aime. Les seules personnes que j’ai continué de voir étaient mes parents et ma soeur qui habitent tous ensemble. J’ai commencé à faire des soupers Facetime avec mes amies pour compenser et j’ai même trouvé ça amusant, puisque ça me rappelait le temps où je vivais à l’étranger et devait m’en tenir à ce genre d’appel pour garder contact avec mes proches virtuellement. J’ai aussi finalement recommencé à travailler après avoir été mise à pied pendant 10 mois. Ça faisait du bien. Je n’aurais jamais pensé être autant excitée de mettre un habit à nouveau pour aller au bureau. Les choses n’étaient pas si mal.
Cependant, pas longtemps après, le couvre-feu et les nouvelles mesures sanitaires sont arrivées et j’ai commencé à travailler de la maison exclusivement. Au début j’aimais ça. Je pouvais me lever beaucoup plus tard puisque je n’avais pas à me rendre au bureau, je pouvais me faire un délicieux café Nespresso tous les matins et je pouvais passer la journée en vêtements confortables. J’ai une très grande capacité d’adaptation en général dans la vie, et cette fois ne faisait pas exception.
Je me sentais bien. J’étais heureuse de ma vie et je me sentais prête à faire face à n’importe quoi.
Puis, tout a chamboulé
Par contre, quelques semaines plus tard, ça m’a frappée. Ça m’a frappée comme une bombe que je n’ai pas vue venir. Pendant 10 mois, j’avais fait face à la pandémie et aux changement qu’elle avait apportés. Je m’attendais à être capable de continuer comme ça jusqu’à ce que les choses reviennent à la normale. Je pensais que ma santé mentale était intouchable et que j’étais infaillible. C’est arrivé si vite que je ne l’ai pas vu venir.
Il s’avère qu’être coupée de mes amies, en plus de travailler de la maison, en plus de vivre seule, ça en est devenu trop après quelques semaines. Je ne m’étais jamais sentie seule en vivant seule. J’ai toujours ADORÉ vivre seule et la liberté que ça me procure. Mais à ce stade-ci, le sentiment de solitude et de tristesse m’ont frappée comme jamais. J’ai finalement réalisé la carence en contacts humains dans ma vie et je ne voyais plus le bout de tout ça. Oui, je voyais encore ma famille immédiate, mais ils ne remplissent pas le même besoin pour moi, donc ça ne faisait aucune différence. L’accumulation de tous ces facteurs m’ont fait touché le fond.
J’ai pleuré. J’ai TELLEMENT pleuré. Ça a duré des jours. Je voulais crier. Je ne voyais plus la fin de cette tristesse. Je ne dormais plus. J’étais épuisée et seule.
Je ne dit pas que les gens célibataires qui vivent seuls l’ont plus dur que les autres. Je pense que nous avons tous des défis différents selon notre situation dans cette pandémie. Dans mon cas, c’est finalement le manque de contact humain qui m’a finalement touchée.
J’ai réalisé que je ne m’étais jamais vraiment sentie seule dans ma vie auparavant. Je ne manque pas de conversation et je me fais des amis rapidement. Peu importe où je suis ou ce que je fais, je me retrouve toujours à rencontrer des gens et faire de nouvelles connections. Que je sois à la maison ou à l’étranger, je ne suis jamais vraiment seule. J’apprécie mon indépendance et mon espace personnel, ce pourquoi j’aime vivre seule, mais la vérité c’est qu’en temps normal, je suis rarement à la maison. Je suis toujours sortie avec des amis ou de la famille. J’ai toujours une distraction et je trouve toujours du contact humain quelque part.
Dans les derniers mois, les distractions avaient diminué, mais j’allais toujours soit au bureau ou soit voir des amies encore. J’avais encore un peu de contact humain. Quand tout a été coupé dans l’espace de quelques semaines, je n’aurais jamais pensé que ça aurait cet effet sur moi. Que je goûterais enfin à la solitude. En toute honnêteté, c’est un des pires sentiments que j’ai jamais ressenti de ma vie.
J’ai consulté ma thérapeute et elle m’a dit que je ne devrais pas voir cette période difficile comme une claque dans le visage. Que cette solitude que je vivais en ce moment ne devrais pas nécessairement être vue comme quelque chose de négatif, mais plutôt comme une épreuve qui a quelque chose à m’apporter pour le futur. Que j’ai une leçon à apprendre et que ce défi s’est présenté à moi dans un moment où je suis assez forte pour le surmonter. Et que quelque chose de beau sortirait de cette période éprouvante. Avec seulement quelques mots, elle a ramené mon état d’esprit positif et je me sentais déjà soulagée.
Ce que j’ai réalisé
Ça fait maintenant deux mois que je me suis sentie comme ça et, la semaine dernière, c’est revenu. Cette fois, par contre, le feeling était familier, donc je l’ai simplement accueilli comme un vieil ami, sachant que je pouvais y faire face. J’ai aussi réussi à avoir un peu de clarté sur ce qui cause ce sentiment, puisque je trouve étrange qu’il soit de retour alors que je vais maintenant prendre des marches avec des amies à nouveau. Alors pourquoi ça perdure?
La première chose que j’ai comprise est que, contrairement à mes amis, presque tous les aspects de ma vie ont été touchés par la pandémie. J’ai perdu mon emploi pendant 10 mois, pendant que leurs emplois sont restés intacts. À cause de cela, mes finances sont aussi devenues précaires en ayant seulement un revenu minimal pendant une longue période de temps et, encore aujourd’hui, en étant seulement de retour au travail à temps partiel pour je ne sais combien de temps encore. Ma vie amoureuse fût aussi touchée, en ne pouvant plus vraiment rencontrer de nouvelles personnes puisque je choisissais de voir mes amies plutôt que de rencontrer un étranger. Presque toutes mes amies sont dans des relations, donc c’était plus difficile pour elle de comprendre. Elles avaient leurs défis aussi, étant maintenant 24/7 avec leur partenaires, mais c’était des défis différents, auxquels je ne pouvais pas m’identifier.
Leurs projets de vie n’ont pas été autant touchés. Acheter une maison/condo, adopter un chien, avoir des enfants… elles ont pu continuer leurs grands projets de vie comme à la normale. Dans mon cas, étant célibataire et les voyages étant ma priorité de vie, tout a été chamboulé, puisque je ne pouvais plus faire la seule chose qui me passionne réellement et qui me fait sentir vivante. C’était coup, après coup, après coup, et je me sentais tellement seule. Je sais que c’est un concours de circonstances et qu’il y a des gens dans des situations bien pires que la mienne, mais lorsque tout ton entourage vit quelque chose de complètement différent, ça te fait sentir prise et seule.
Comprenez-moi bien, je ne m’apitoie pas sur mon sort. Pendant cette pause forcée, j’ai trouvé de nouveaux projets. J’ai pris des cours en ligne, j’ai commencé à apprendre une nouvelle langue, j’ai lu beaucoup de livres, etc. Ça m’a aussi permis de faire beaucoup de travail sur moi-même et de réfléchir à ce que je veux réellement dans la vie. Je suis reconnaissante pour ça. Tout ce que je dis, c’est que je me suis sentie seule dans ces défis, puisque personne autour de moi ne pouvait réellement comprendre.
Il y a aussi un autre aspect à cette solitude que j’ai pu mieux comprendre. Je suis tombée sur cet article du journal The Independent, qui décrit exactement comment je me sens. J’ai besoin de contact humain physique. Non, je ne veux pas dire par là du sexe nécessairement, c’est plus large et plus subtil que ça. Comme ils le décrivent dans l’article, c’est plus comme une « soif de peau » ou un « manque d’affection », ce qui expliquerait pourquoi aller prendre des marches avec des amies ne remplit pas ce besoin. L’article m’a fait réaliser à quel point on a plusieurs contacts physiques subtils dans notre vie en temps normal, que ce soit une poignée de main au bureau ou se faire la bise lorsqu’on va souper chez des amis. Dans mon cas, ça fait des mois que quelqu’un m’a touchée. Je ne fais pas de câlin à mes parents puisque je prends des marches avec des amies et je ne fais pas de câlins à mes amies puisque je vois mes parents. On ne réalise pas comment ce manque de contact humain peut avoir un impact sur notre santé mentale avant de le vivre. Et j’y ai définitivement eu un bon aperçu de ce que ça peut faire.
Aujourd’hui
J’apprends toujours comment surmonter ce sentiment. Je m’assure de prendre du temps pour m’écouter et d’accueillir ces émotions lorsqu’elles viennent. Je me rappelle que c’est temporaire et que tout finit par passer. Parfois, c’est encore difficile de voir le bout, mais c’est un bon défi pour l’esprit. Quand ça me frappe, je travaille à changer mon état d’esprit vers le positif… jusqu’à la prochaine vague. J’espère qu’au fur et à mesure que je deviens meilleure à surmonter les vagues, elles seront de moins en moins forte et viendront de moins en moins souvent. Entre temps, je suis déterminée à relever le défi.